"MEXICO (AFP) - Le long métrage "Un Dia Sin Mexicanos" (Un jour sans Mexicains) de Sergio Arau qui raconte une Californie privée pendant un jour de ses hispanophones, a suscité des réactions mi-figue, mi-raisin vendredi soir au premier jour de sa sortie au Mexique, terre natale du réalisateur.
"Le film est très bon, j'ai beaucoup ri mais je suis également triste parce que ce qui se passe dans le film ne se produira jamais et les Mexicains continueront d'être humiliés et maltraités", a estimé une spectatrice, Maria Guadalupe Cabra, originaire de Zacatecas, zone de forte émigration.
En un peu plus de 90 minutes, la fiction de Sergio Arau, 52 ans (fils du célèbre réalisateur mexicain Alfonso Arau) montre une Californie totalement désemparée quand elle se réveille un matin et que ses 12 millions d'habitants latino-américains, soit un tiers de sa population, ont disparu: du jardinier au plongeur jusqu'aux scientifiques et artistes.
Les ligues de base-ball perdent leurs meilleurs joueurs, il n'y a plus de nounous pour les enfants, les ordures s'accumulent sur les trottoirs, on ne trouve plus de "burritos" (plat mexicain), les oranges pourrissent dans les champs et les acteurs Salma Hayek et Benicio del Toro disparaissent des couvertures des magazines.
Les Californiens pleurent littéralement l'absence des "hispanos", regroupés pour eux sous l'appellation "Mexicains", et commencent à réfléchir sur le manque de connaissance qu'ils ont de ce groupe ethnique.
Le retour des "latinos" qui devient une priorité numéro un de l'Etat de Californie, provoquera des scènes de jubilation hilarantes comme celle où des agents de la patrouille des frontières reçoivent avec des cris de joie les premiers immigrants illégaux.
Pour de nombreux spectateurs de la "première" à Mexico, cette scène est pourtant douloureuse sachant que cette patrouille a récemment annoncé qu'elle utilisera des balles au gaz irritant pour dissuader les clandestins.
Sur 300.000 Mexicains qui tentent chaque année de traverser la frontière mexicano-américaine qui court sur 3.000 kilomètres, 200 meurent dans le désert ou noyés dans le Rio Bravo, les deux canaux les plus empruntés en raison des fortes mesures anti-immigrants sur les voies classiques.
"C'est un excellent film parce qu'il montre l'importance des Mexicains là-bas (aux USA) et nos traditions mais c'est déprimant que dans le meilleur des cas ils soient pratiquement invisibles et qu'au pire ils soient traités comme des criminels s'ils essaient d'arriver aux Etats-Unis", a estimé un autre spectateur, Dagoberto Diaz.
Entre trois et cinq millions de Mexicains résident illégalement aux Etats-Unis. M. Arau a eu l'idée de faire un film humoristique sur ce thème après son arrivée à Los Angeles avec son épouse, il y a douze ans. Le long métrage est sorti aux Etats-Unis début juillet et a rencontré un grand succès dans le public "latino".
"Nous sommes tous les deux (avec sa femme) convaincus que l'humour est un instrument merveilleux parce que les gens se détendent", a expliqué à l'AFP M. Arau. Il a toutefois souligné que l'objectif réel de son film est de sensibiliser les Américains à un message politique et social.
"Un Dia Sin Mexicanos" est pour le réalisateur qui dit avoir souffert de la discrimination, "un cri montrant que nous voulons être visibles et reconnus". "Ce n'est pas une campagne (politique) mais d'une certaine manière, le vote latino a clairement une importance maintenant", a-t-il noté.
Les affiches faisant la publicité du film dans les rues de Mexico ont choisi un ton volontairement provocateur: "le 6 août, les +gringos+ vont pleurer", en utilisant le terme argot péjoratif qui désigne les Américains au Mexique."
Franchement de prime abord, ça a l'air pas mal du tout ce truc
