Sony rembourse les navets

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BouBout
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Sony rembourse les navets

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Sony rembourse les navets


Le studio américain avait placardé des critiques élogieuses de ses films écrites par un journaliste imaginaire. Il va dédommager les spectateurs bernés.

«Le critique de cinéma qui n'était pas là» : c'était le titre de l'article de John Horn publié dans Newsweek en juin 2001. Le critique n'était pas là parce qu'il n'existait pas, même si ses citations enthousiastes étaient imprimées en gros sur les affiches de Hollow Man, du Patriot (avec Mel Gibson), de Vertical Limit et autres films du studio Columbia Tri-Star, filiale de Sony Pictures.

Il est certes fatigant de devoir convaincre les critiques de cinéma de dire du bien d'un film, alors pourquoi ne pas se simplifier la vie en écrivant soi-même les louanges ? Voilà ce que s'était dit, à l'époque, un responsable du marketing de Sony. Il avait alors eu l'idée brillante d'inventer le critique idéal, un certain David Manning, qui écrirait dans un petit journal local du Connecticut, bien réel celui-là, Ridgefield Press. David Manning, lui, adorait toujours les films de la Columbia, surtout ceux qui avaient été démolis par la critique unanime.

Press junkets. C'est en enquêtant sur les pratiques des studios qui «achètent» les critiques à coup de cadeaux, de voyages gratuits et de rencontres avec les stars ­ le système des press junkets, où les journalistes sont choisis par les studios pour pouvoir faire partie des groupes qui vont interviewer collectivement les stars des superproductions hollywoodiennes ­ que le journaliste de Newsweek était tombé sur le mystérieux David Manning. Inconnu au Ridgefield Press, découvre-t-il. Et finalement inexistant.

Les responsables du studio avaient tenté de se défendre, parlant du droit à la liberté d'expression, mais effaçant vite les citations de Manning sur les publicités des films et mettant en congé deux cadres du marketing chez Sony. Mauvais timing, cette affaire arrivait en même temps qu'un autre scandale de détournement journalistique, celui des faux spectateurs. Pour le lancement de leurs films, tous les studios hollywoodiens, et pas seulement Columbia-Sony, avaient pris l'habitude d'interviewer des spectateurs enthousiastes sur le trottoir, devant les cinémas, et d'intégrer ces «reportages sur le terrain» à leurs campagnes publicitaires. Les spectateurs enthousiastes étaient en réalité des employés des studios ou des acteurs payés.

«Zombies débiles». Devant ces agissements quelque peu mafieux pour vendre à tout prix les films, les vrais spectateurs ont réagi. Une association de «Citoyens pour la vérité dans la publicité des films» (Citizens for Truth in Movie Advertising) s'est même constituée. Et, comme l'affaire se passe aux Etats-Unis, ces (vrais) citoyens ont porté plainte. Un premier juge de Los Angeles leur a d'ailleurs donné raison et a estimé, en acceptant de recevoir ces plaintes en 2001, «que les gens ont le droit de ne pas être traités comme des zombies débiles qu'on attire dans les cinémas avec des articles fantômes».

Les tribunaux ont donc poursuivi Sony, qui a préféré signer un accord à l'amiable avec les spectateurs en colère pour éviter le procès et mettre fin à la procédure. La semaine dernière, quatre ans après que le scandale a été dévoilé, le studio a accepté de rembourser 5 dollars à toute personne qui est allée voir Hollow Man, The Animal, The Patriot, A Knight's Tale ou Vertical Limit dans les cinémas, entre le 3 août 2000 et le 31 octobre 2001, parce qu'elle avait lu ces fausses critiques d'un faux journaliste. En tout, Sony Picture Entertainment (SPE) va payer 1,5 million de dollars aux spectateurs furieux d'être allés voir un mauvais film. Les Citoyens pour la vérité dans la publicité des films ne vont pas s'arrêter là, ils exigent de tous les studios hollywoodiens qu'ils cessent leurs pubs trompeuses, leurs interviews bidons et qu'ils arrêtent de corrompre les critiques de cinéma.

Toutefois, les faux journalistes ne sont pas qu'une spécialité de l'industrie cinématographique. Peut-être inspirée par Hollywood, la Maison Blanche avait, au cours de la dernière campagne présidentielle, elle aussi inventé son faux journaliste : un militant républicain qui prétendait être journaliste et allait poser les «bonnes» questions au président Bush pendant les conférences de presse. La moitié de l'Amérique qui a voté pour Bush pourrait, comme les spectateurs en colère, s'estimer trompée. Et réclamer des dédommagements ?
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