Monsieur Klein
Posté : 25.05.2004 - 19:22
Le genre de film pour lequel le terme chef d'oeuvre semble avoir été inventé .
Ecrasant,mise en scène,scénario ,interprétation,tout tire vers une tragique perfection.
Paris,1942.L'histoire est celle d'un marchand d'art peu scrupuleux qui achète pour une misère des oeuvres de grandes valeur à des juifs contraints au départ.
Première scène terrible,inhumaine,la détresse qui reste muette au regard glaçé de Delon ,puis un journal sur le pas de la porte,tiens "gazette juive",on a du confondre,un autre Mr .Klein,juif celui-là ,une erreur administrative.
Et le décor est planté .
Le récit devient celui d'une qûete,policière d'abord,existentiel ensuite,métaphysique .
Moins qu'un énigmatique personnage,c'est l'homme qui est en lui que poursuit Delon , habileté de la mise en scène qui multiplie les mises en abymes,les plans terrifiés devant les miroirs,les jeux d'apparences,de ressemblance ,jusqu'à une sublime scène finale dans le stade,la gare,le wagon ou les hommes s'entassent pour aller mourir et dont Klein le profiteur de guerre fait désormais partie,avec toujours l'ombre derrière lui,qu'il ignore désormais,une silhouette,l'alter ego,un juge,un bourreau,une victime .
Et ce regard de Delon ,pur et grand moment de mise en scène ;qui vous fait frissonner des jours durant .
Joseph Losey,au delà de Klein, interroge cette population soumise à l'occupation et à des dilemmes moraux et idéologiques profonds,par de longs travellings il semble chercher,traquer l'humanité dans cette masse criarde,peureuse .
Drame,puissant, profond qui cotoye le fantastique ,mêle la paranoia du pariah au mystère ,délivre scènes terribles de haine et grands moments d'étrangeté,comme cette halte dans une opulente maison,un paradis perdu,un mirage qui aura disparu au réveil ,avec une Jeanne Moreau insondable.
Film de 1976,récompensé du César,produit par Delon lui-même qui a chippé le projet à la paire Montand-Costa Gavras .
Un film hallucinant .