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Joie ineffable : la Starac est enfin de retour. On saura à nouveau quoi faire le vendredi soir.
Rihanna, la marraine de cette huitième promotion, ouvre le spectacle sur "Please Don't Stop the Music", entourée par les élèves, que l'on découvre dès le début de l'émission contrairement aux habitudes. Filles et garçons tentent de se trémousser en rythme en affichant des poses sexy. L'ensemble est plutôt désordonné et cacophonique mais soyons indulgent. C'est leur première fois et ce n'est sûrement pas facile de chanter et danser à côté de Rihanna sous les yeux de millions de téléspectateurs. Oui, TF1 a encore des millions de téléspecteurs - et non des milliers, comme le dira plus tard Christophe Maé - Laurence Ferrari ne les a pas encore tous éliminés.
Voici que s'avance Nikos à travers les fumigènes. Formidable Nikos ! Elegant, spirituel, cultivé, il est parfait. J'exagère sans doute un peu. Nikos est toujours le même. Mais après un été marqué par "Secret Story", j'ai encore l'image de Benjamin Castaldi imprimée sur la rétine et à côté de Castaldi n'importe qui a l'air élégant, spirituel et cultivé. En tout cas, Nikos est incontestablement un grand professionnel. Par exemple, lorsqu'il annonce sobrement l'arrivée de Christophe Maé, l'autre parrain de l'émission, - "Il est beau, c'est un phénomène, Christophe Maé" - et que... personne n'arrive, Nikos ne perd pas son sang froid et, imperturbable, recommence son introduction. Cette fois, ça marche, les écrans géants coulissent et Christophe apparaît. On n'a presque rien remarqué.
Mais voici qu'une foule s'empare soudain de la scène. Qui sont gens ? Des intermittents du spectacle venus manifester ? Des agriculteurs en colère ? Après vérification, il s'agit du corps professoral. Ses membres, bien que "recrutés parmi les plus grands professionnels", sont parfaitement inconnus. L'un d'entre, danseur de flamenco de son état, est pourtant censé être une "star internationale". Il parle étrange langue que Nikos semble être le seul à pouvoir comprendre. Les autres diront diront peu de chose au cours de la soirée, en tout cas rien d'intelligent.
Il y a cependant un visage connu dans ce groupe d'anonymes. Lèvres pulpeuses, moue boudeuse, coiffure échevelée, teint blafard. C'est Armande Altaï, professeur de chant historique de la Starac, qui remplace Alexia Laroche-Joubert dans le rôle de directrice. Merveilleuse Armande. On voit tout de suite que c'est une femme de coeur. Elle a choisi de s'habiller en clocharde ce soir, vraisemblablement pour attirer l'attention sur le sort des sans-abris à l'approche de l'hiver. La présence d'Armande à un si haut niveau de responsabilité est un geste très délicat de TF1 à l'intention de ses téléspectateurs âgés, dûrement éprouvés par le départ brutal de PPDA (si éprouvés qu'ils sont allés voir ailleurs alors qu'on les croyait incapables d'utiliser une télécommande pour changer de chaîne).
A mieux y regarder, il y a d'autres visages connus, comme Jasmine Roy, la répétitrice québécoise, ou Christophe Pinna, le professeur de sport philosophe. C'est aussi le grand retour de Philippe Lelièvre, professeur de théâtre de la saison 6, qui met donc entre parenthèses sa mirobolante carrière d'ambassadeur des céréales Special K. C'est bizarre : je ma rappelle d'une époque pas très lointaine où Monsieur Lelièvre parlait avec condescendance de son expérience à la Starac, faisant même mine d'avoir oublié le nom de ses élèves. Il a apparemment changé d'avis : il faut bien vivre, n'est-ce pas ? Aujourd'hui, il nous explique comment il va désinhiber les candidats avec des accents de réalisateur de film pornographique. Ce type a vraiment une très grande classe.
Et bien sûr, il y a Kamel Ouali, le plus grand chorégraphe de France, inamovible professeur de danse depuis la toute première saison. L'illustre Kamel a à peine mis un pied sur le plateau que Nikos nous parle déjà de sa nouvelle comédie musicale, Cléopâtre. J'ai dans l'idée qu'on va en entendre parler au moins un million de fois avant la fin de l'année.
Parmi ceux qui manquent à l'appel figure naturellement Alexia Laroche-Joubert. Elle produit maintenant d'autres émissions sur d'autres chaînes et se consacrent à ses enfants, notamment son bébé né l'an passé durant l'émission. Je tiens à rappeler que ce bébé n'est pas l'antéchrist, contrairement à une rumeur qui avait couru à l'époque sur Internet. Il faut dissiper ces méchantes rumeurs, même si je dois admettre que celle-ci était tout à fait vraisemblable. De même, nous ne verrons pas cette année Raphaëlle Ricci, la sorcière blonde qui faisait pleurer des adolescents apeurés durant ses cruels debriefings du prime. Elle aussi poursuit sa carrière... chez elle, un paquet de chips à la main.
Mais assez parlé des professeurs, présents ou passés. Ceux qui comptent vraiment, ce sont les élèves. Chacun d'eux, avant de pousser la chansonnette quelques minutes, aura droit à un petit portrait d'introduction du meilleur goût. Ils sont scénarisés d'une façon très subtile et joués à la perfection.
J'ai particulièrement apprécié le passage quasi systématique où le candidat, en général très jeune, annonce à ses parents qu'il a choisi de faire carrière dans la musique. Bizarrement, aucun de ses heureux parents ne répond "file dans ta chambre au lieu de dire des conneries" comme on pourrait s'y attendre. On voit néanmoins défiler un large éventail de réactions. Réponse poétique pour le père d'Alice : "On ne peux pas tenir un rossignol dans une cage, donc tu t'envoles." Réponse volontariste pour le père d'Edouard : "Moi, je suis d'accord à partir du moment où tu t'investis à fond." Réponse craintive mais résignée pour la mère de Maryline : "J'ai peur qu'il t'arrive un malheur. Si tu veux y aller, je te laisserai partir. Je ne peux pas t'en empêcher, ça c'est sûr." Réponse pragmatique pour la mère de Joanna : ""Mais là, il faut que tu ailles dans une école de chant. Nous, on n'a pas les moyens de te financer ton école, hein ?" Et enfin, réponse carrément bipolaire de la mère de Solène : "On est avec toi, ma puce" alors que, quelques instants auparavant, elle lui disait "la comptabilité, pour toi, c'est ton avenir".
D'une façon générale, tous ces reportages donnent une image assez singulière des élèves et un curieux exemple aux jeunes téléspectateurs. La plupart des candidats ont abandonné leurs études pour poursuivre leurs rêves de gloire musicale. Et leurs parents, quand ils sont présents, ne paraissent pas s'inquiéter outre mesure des fumeux projets de leurs enfants alors que, pour certains d'entre eux, il est évident que leurs chances de les réaliser sont des plus minces. Quelques candidats ont quitté leur foyer et semblent mener une vie plus ou moins marginale, livrés à eux-mêmes. Or, si comme le dit Gautier, "tu n'as pas besoin que ton frigo soit rempli pour être heureux", c'est quand même assez pratique pour rester en vie. Le message de la soirée semblent donc : "Les études, ça ne sert à rien. Mieux faire la Starac pour réussir."
Les reportages présentent aussi toute une série de personnages hauts en couleurs, avec parfois l'effet de les rendre ridicules ou franchement antipathiques, voire les deux à la fois. Comme Harold, ingénieur informatique de son état (on filme quelques lignes de code HTML en gros plan pour le prouver...) et dont nous dit qu'il est "l'un des esprits les plus brillants de sa génération" et qu'il avait "un chemin tracé vers la réussite". Chemin tracé qu'il abandonne en rédigeant devant la caméra sa lettre de démission, qu'il conclut en ces termes : "Starac, c'est l'occasion de faire enfin ce que j'aime et je ne vais certainement pas passer à côté." J'espère pour lui qu'il ne s'agit que d'une mise en scène parce que, au vu de sa prestation, un congé sans solde aurait été largement suffisant, voire simplement quelques jours de RTT.
Parmi les personnages, il y a aussi Yvane, 29 ans, dont Nikos nous dit qui'l est "un mec, un vrai. Il aime les voitures, il aime soulever de la fonte et séduire les filles." On apprendra plus tard qu'il a aussi un coeur et travaille comme veilleur de nuit pour une association qui s'occupe de personnes handicapées. Le portrait de Gaëtan, 19 ans, est également réjouissant. Il veut réussir dans la musique pour aider sa mère et son petit frère, avec lesquels il vit dans un appartement de 16 m² en banlieue parisienne. Il est honnête et fier et "préfère être pauvre plutôt que gagner sa vie dans l'illégalité." Néanmoins, l'optique selon laquelle, en banlieue, on ne peut réussir que dans la musique ou le crime me semble un tantinet réductrice. Par ailleurs, si on veut faire une carrière licite, se couvrir le corps de tatouages comme Gaëtan me paraît être une fausse bonne idée, même si j'admets volontiers que cela peut être utile dans certaines circonstances, comme l'a démontré Michael Scofield dans "Prison Break". En tout cas, le portrait de Gaëtan dissipe au moins un préjugé : en le voyant avec ses amis, je n'aurais jamais imaginé qu'ils pouvaient être fans de M. Pokora. Et pourtant si. M. est apparemment très populaire dans les banlieues, sans doute en raison de ses textes engagés et de ses positions sans compromis.
En parlant de positions sans compromis, j'ai également apprécié les deux rebelles auto-proclamées de la promotion, Julia et Maryline. L'une sêchait les cours au lycée ; l'autre possède un furet domestique. Avec des rebelles de ce calibre, on sent que la révolution est marche et que les fondements de la société sont prêts à s'effondrer.
Mais je m'aperçois soudain qu'après tous ces paragraphes, j'ai à peine parlé de musique, ce qui, étrangement, arrive fréquemment quand on parle de la Starac. Plutôt que d'évoquer les prestations des candidats, assez oubliables (sauf celle d'Alice mais pour des raisons liées à sa robe et qui n'avaient rien d'artistiques), je vais plutôt m'attacher à celle de Rihanna sur "Disturbia". Cinq élèves avaient l'honneur de chanter avec elle. Par "avec", je veux dire "derrière" et en fait "loin derrière". Et par "chanter", je veux dire "mimer les refrain". Je comprends Rihanna : chanter "Bum bum be-dum bum bum be-dum bum", c'est compliqué. Mieux valait jouer la sécurité. Plus sérieusement, Rihanna a 20 ans, à peu près l'âge des candidats, et il suffit de la regarder et de l'écouter pour comprendre pourquoi elle est là. Elle, je n'ai aucun mal à comprendre pourquoi ses parents l'ont laissée abandonner ses études.
Pour conclure (parce qu'il faut bien conclure), quatre élèves ont été prénominés par les professeurs à l'issue de ce premier prime. Il en sera de même après chaque prime. Il s'agit de Laure, Gaëtan, Julia et Alice. Ne faites pas semblant d'être tristes pour eux ; vous ne les connaissez même pas. Par ailleurs, je crois reconnaître à des signes très subtils que des favoris se dessinent déjà, par exemple quand Nikos dit à Laure ""Si vous êtes encore là, la semaine prochaine" et à Joanna "Vous allez être là pendant treize semaines".
On verra bien. A la semaine prochaine.